Après son retour à la compétition au Tour de Grande-Bretagne, longtemps ai-je hésité à prendre la plume pour aborder le cas Remco Evenepoel.
Les raisons étaient simples : le Brabançon s’est montré égal à lui-même sur les routes britanniques, à savoir très (trop?) expressif sur le vélo, très (trop?) prompt à passer à l’offensive, râlant sur ses comparses quand ceux-ci ne daignaient pas rouler avec lui, mettant un coup de frein vicieux (récoltant au final une amende de 100 Fr suissesè, etc. Bref, je me disais qu’on retrouvait le même Remco du Tour. Trop sûr de lui, qui se met rapidement la pression et qui risquait de perdre pas mal d’influx nerveux en raison de la tension médiatique, etc.
Au final, j’ai pris mon mal en patiente me disant que notre Remco n’en est pas à son coup d’essai en termes de come back fracassant. Bien m’en a pris ! Notre compatriote a répondu (encore une fois) face à l’adversité. Beaucoup de détracteurs doivent à l’heure qu’il est marmonner dans leur barbe. Mais l’éclatante victoire sur les Championnats du Monde CLM constitue l’un des plus hauts faits d’armes du, dorénavant, triple champion du monde du chrono !
Au-delà du résultat, c’est surtout la manière qui est à retenir : jamais lors de ses deux précédents titres il n’avait créé de tels écarts. Plus fort encore, c’est un véritable camouflet qu’il a infligé à Pogacâr en le rattrapant dans les derniers kilomètres de l’épreuve. Mettre 2m37 à celui qui archi-domine le cyclisme depuis plus de deux ans et le rattraper sur un parcours qui devait normalement plus lui convenir, c’est de l’ordre de l’humiliation ! De quoi faire le plein de confiance avant l’épreuve en ligne de dimanche prochain.
Mais je t’en prie Remco, si tu lis ces lignes, ne te dis pas comme cela a pu être le cas par le passé que tu es le co-favori de la course des championnats du monde. La vérité d’un jour n’est pas celle de l’autre.
Repense à Liège où tu t’es avancé dans les médias comme capable de suivre et potentiellement battre Pogi. Repense à ta victoire au chrono sur le Tour et à la tournure que cela a ensuite pris. Ne te dis pas que la Belgique doit faire la course à tout prix (et on espère que le staff va comprendre qu’il faut laisser le poids de la course au véritable favori). N’étale pas ton surplus de confiance aux yeux du monde. Cette pression que tu t’imposes ne peut être que source d’ennuis. Un peu à l’image d’un Vingegaard, reste humble face à l’adversité. Un CLM n’est pas une épreuve en ligne et inversement. Focalise toute ton énergie sur toi, tes équipiers, sur le repos et l’entrainement jusque-là. Le reste n’est que fioriture car tes Mondiaux sont déjà plus que réussis. Faire profil bas ne s’avère pas un aveu de faiblesse, mais bien de maturité. Reste à toi de garder la tête froide et de déclencher l’enthousiasme d’une nation toute entière si tes jambes te le permettent le jour » j » !

Photos : Jean-François Banachek