TADEJ POGACAR : A tout leader tout honneur ! Tadej Pogacâr porte le maillot jaune sans discontinuer depuis sa victoire à Valloire et son attaque dans le dernier KM du Galibier. Il a profité de l’essoreuse UAE qui a vraiment répondu présent ce jour-là. A ce stade de la course, il est normal de le retrouver au sommet de la hiérarchie…il était attendu comme le GRAND favori et il répond présent. Très polyvalent, il a attaqué dès la deuxième étape explosive dans la montée de San Luca, mais sans prendre de temps. Sur le chrono, il finit 2e à 12 petites secondes. Et sur les routes blanches, il était certainement l’un des plus fort, voire le plus fort.
Maintenant, plusieurs questions se posent autour de l’autoritaire Slovène : en montagne, la qualité de sa Dream Team n’est plus à démontrer, mais des fissures sont apparues dans l’armure émiraties. Lors des tentatives de bordures, le maillot jaune était isolé face à des équipes bien mieux loties, Visma en tête. Heureusement cela n’a pas porté à conséquences. Sur les routes blanches, nous faisons un peu le même constat : des équipiers présents mais paraissant impuissants. Et dernier interrogation, Pogi pourra-t-il tenir à ce niveau pendant encore deux semaines ?!
REMCO EVENEPOEL : qui aurait imaginé une telle première semaine pour Remco Evenpoel à l’issue de son premier Tour de France ? Qui plus est quand on sait ce qu’a été son printemps et sa préparation tronquée pour la Grande Boucle en raison de la chute au Tour du Pays basques. Sa note frôle le 10/10 avec une 2e place au général à 33 secondes et une étape en poche. Jusqu’à hier, il a été attentiste, ne prenant jamais l’initiative. Il a rongé son frein et réfréné son tempérament offensif. Mais il a aussi répondu présent quand il était le favori logique du CLM de 25 km. Cependant, pour le coureur de Schepdaal, on peut regretter que l’épreuve contre le chrono n’ait pas été plus longue pour créer des écarts peut-être plus conséquents encore. Alors ASO, quand reviendra-t-on à des formats un peu plus longs ? L’ancien champion du monde semble monter en puissance au fil des jours. Reste encore au Belge de répondre présent quand les étapes difficiles s’enchaineront. Une partie de réponse a déjà été donnée puisqu’il a franchi le Col de Galibier en 3e position, derrière les deux derniers vainqueurs, à seulement 13 petites secondes de Pogacâr et à 2642m d’altitude. Petit bémol, l’équipe n’est pas encore assez aguerrie et solide autour du vainqueur de la Vuelta 2022. En montagne Mikel Landa a donné le change. Sur les étapes de plat rien à redire. Mais sur l’étape des chemins blancs, Remco a vite dû se débrouille seul, même si Moscon et Landa ont pu donner un petit coup de mains ici et là. Quand l’ancien champion de Belgique était mal placé, il a parfois dû faire l’effort lui-même. Heureusement sans conséquence sur le classement général. Un coureur comme Lampaert n’aurait pas été de trop pour aider celui qui dit ouvertement viser le podium, mais il était aux abonnés absents !
- ETAT DE FORME : L’état de dorme du champion était un vrai point d’interrogation au départ du Tour. Sa prestation au Dauphiné n’avait pas tout à fait rassuré. Le mur de San Luca, le Galibier et les chemins blanc franchis, il peut être conclu que Remco EVENEPOEL est en grande forme. Il apparaît par ailleurs particulièrement affuté et semble sortir du lot au même titre que ses deux principaux rivaux slovène et danois.
- ETAT D’ESPRIT : Le Belge a parfois la langue bien pendue. Sur ce Tour, il se fait relativement discret dans les médias (à l’exception de sa petite punch line à charge de Jonas VINGEGAARD ce dimanche). Dans le peloton, il se fait également discret et n’apparaît à l’avant que quand c’est strictement nécessaire. Il évite les efforts inutiles (autant que possible) et la prise de risque est limitée. Bref, Remco EVENEPOEL est concentré sur son sujet et veille à ce que rien n’ébranle cette concentration.
- EQUIPE : Son équipe n’est par moment pas à la hauteur. Cette faiblesse par moment est encore plus criante à l’aune de la qualité des équipes adverses. L’étape de ce dimanche a été la parfaite illustration de cette indigence. Alors que la VISMA et UAE plaçaient, ramenaient et protégeaient leurs leaders, le champion belge a dû se débrouiller seul dans le final de la course. Il a pu compter sur le seul Gianni MOSCON dans les 80 derniers kilomètres. Quand il a loupé un virage dans l’avant dernier secteur, il a dû cravacher seul pour revenir sur la tête. A titre de comparaison, lors de sa crevaison, Jonas VINGEGAARD a récupéré le vélo de son coéquipier TRATNIK et s’est fait ramener en carrosse par VAN AERT et LAPORTE. Un coureur comme Lampaert n’aurait pas été de trop pour aider celui qui dit ouvertement viser le podium, mais il était aux abonnés absents ! Tous les efforts que Remco EVENEPOEL doit faire et que ses adversaires ne font pas risquent de se payer à la fin du Tour. Cela étant dit, nous devons souligner les performances de Mikel LANDA qui était là où l’attendait dans l’étape du Galibier.
JONAS VINGEGAARD : Que dire du Danois ? Par moment très bon, il est aussi parfois très clairvoyant et gestionnaire. Sachant qu’il n’est pas au sommet de sa forme et de son art, Vingegaard a pour l’instant très bien géré son début de Tour même s’il accuse déjà un débours de 1m15 sur le maillot jaune slovène. Lui se satisfait d’un tel écart et d’une troisième place au classement général. Confiant, il le reste. Plus les jours passent, plus son heure approche se dit-il. Il est vrai que les premières étapes du Tour n’étaient pas spécialement faîtes pour lui. En Italie, des étapes accidentées et explosive, puis une 4e étape de type montagneuse qui arrive tôt dans le Tour et enfin un contre-la-montre où il ne perd que 37 secondes sur le champion du monde de la spécialité. Mais nous sentons encore chez le double tenant du titre, une fragilité liée à une préparation mise à mal par sa chute au Tour du Pays basque. Exemples : il n’a pu suivre l’attaque de son meilleur ennemi dans le dernier km du Galibier, bien parti dans le clm il a ensuite fini moins fort et dans la souffrance.
Enfin, sur les routes blanches, heureusement que la Visma s’est retrouvée et a pu épauler son leader tout au long de la course, lui qui est moins puissant que ses deux adversaires qui le précèdent. Reste à voir comment lui et son équipe vont évoluer dans ce Tour. L’absence de Kuss ne va-t-elle pas poser problème ? Va-t-il redevenir le meilleur grimpeur du plateau ? Va-t-il se mettre au diapason et reprendre de sa superbe des années précédentes, ou le manque de fond et de préparation vont-ils lui nuire ? Réponse dans les deux semaines qui viennent…
PRIMOZ ROGLIC : L’autre Slovène qui désire jouer la gagne est actuellement quatrième du quatuor qui se dégage pour l’instant. Placé à 1m36 de son compatriote, l’écart n’est vraisemblablement pas rédhibitoire. Mais Primoz, l’ancien pourrions-nous dire, s’il n’a pas encore craqué, a montré des signes parfois inquiétants dans les moments qui comptent. Que ce soit au sommet du Galibier, sur les routes blanches, nous ne l’avons pas vu à son avantage. Cependant, il exprime à qui veut l’entendre qu’il va mieux de jour en jour.
Sur le CLM, il a limité les dégâts et ne s’est jamais affolé sur les parties gravel quand bien même il était lâché par l’adversité. Il faut souligner que Roglic est un coureur d’expérience (des quatre, c’est lui qui a remporté le plus de Grands Tours) et qui sait à merveille gérer trois semaines de courses. Côté équipe, rappelons qu’il a quitté Visma pour se libérer de Vingegaard pour jouer sa carte sur le Tour, elle est aussi mi-figue mi-raisin. Nous n’avons pas trop vu les couleurs Redbull sur les routes blanches. Et en montagne, il est solidement entouré, du moins sur papier, avec les présences de Jay Hindley et de Vlasov. Or, le Russe a chuté lourdement hier et semblait sonné au moment de remontrer en selle et a déclaré forfait après la journée de repos.
LES BELGES : Côté noir-jaune-rouge, outre le cas Evenepoel sur lequel nous n’allons pas revenir, nos compatriotes se sont montrés à leur avantage, tout en manquant de chance et de réussite. Nous dénombrons de nombreuses places d’honneur : van Aert a fini 3e de la première étape, Philipsen n’a pas encore scoré malgré plusieurs 2e places. Idem pour Arnaud de Lie, le champion de Belgique qui découvre le Tour, qui a fini deux fois troisième et tourne autour de la gagne depuis le départ de Florence. Enfin n’oublions pas la magnifique tentative de Jasper Stuyven hier sur les routes blanches qui a été repris à moins d’un km de l’arrivée après un solo passionnant contre ses anciens comparses d’échappée.
- Côté collectif, les teams noir, jaune et rouge n’ont pas à rougir. Surtout chez Intermarché-Wanty où nous comptabilisons déjà deux victoires d’étape via l’intermédiaire du sprinteur maison Biniam Germay. Ce dernier est par ailleurs largement en tête du classement du maillot vert. Il s’agit de deux premières victoires sur le Tour de France depuis la création de l’équipe.
- Chez Lotto-Dstny, si la victoire n’est pas encore au rendez-vous, les intentions y sont. Très souvent à l’initiative en début d’étape ou à la fin pour placer le Taureau de Lescheret, l’équipe de Stéphane Heulot tourne autour. Il suffirait d’un rien, juste d’un meilleur placement par exemple, du sprinteur ardennais pour ouvrir le compteur. Notons quand même la très belle prestation de Victor Campenaerts sur le CLM avec une 5e place derrière les « quatre fantastiques ».
- Pour Soudal Quick Step, le Tour est d’une certaine manière déjà réussi avec la victoire de sa pépite nommée Remco. Les hommes de Patrick Lefevere ne seront finalement comblés que si Evenepoel arrive à monter sur la boîte le 21 juillet prochain à Nice. Par contre, au vu des performances moindres de certains, l’absence de Tim Merlier est aujourd’hui complètement incompréhensible.
- Enfin pour Alpecin-Deceuninck, il manque encore un petit quelque chose. Qu’il s’agisse de Jasper Philipsen ou de Mathieu van der Poel, les astres tardent à s’aligner. Mais nous ne doutons pas qu’ils tenteront encore d’y parvenir.
- LES ATENTES : les Belges ont largement dominé les sprints durant toute la première partie de la saison. Ne pas encore avoir scoré sur un de nos terrains de prédilection est une anomalie à vite réparer lors de la deuxième semaine. Il y aura des possibilités, à eux de les saisir ! Une victoire lors d’une échappée n’est pas non plus une utopie. Maxim Van Gils, Victor Campenaerts, et … un Jasper Stuyven revanchard devrait repartir à l’attaque de plus belle.
(Article rédigé par Matthieu Henroteaux et Damien Wilmotte)