En ce 17 juin, c’est le Plat pays tout entier qui célèbre son plus illustre champion : Eddy Merckx. C’est même le monde de la Petite Reine qui fête les 80 ans de son plus grand coureur. Car oui, malgré le fait que notre Eddy national affiche 80 bougies, il reste à ce jour ce qu’il se fait de mieux dans le cyclisme, tant par son palmarès que par son aura.
Même si le monde du vélo a beaucoup changé, il paraît raisonnable d’affirmer que personne n’est encore prêt à battre son record de 525 victoires sur route. Même Tadej Pogacar, qui ne cache pas avoir envie de marquer le cyclisme de son empreinte, a peu de chance d’égaler la marque laissée par le Cannibale. Le Slovène aura 27 ans en septembre et totalisera bientôt 100 succès en carrière. À la cadence infernale à laquelle il garnit son armoire à trophées, loin de nous l’idée de le voir encore enchaîner 5 à 10 ans avec autant de compétitivité et d’appétit.
C’est en cela que Merckx reste unique : sa faim ne s’est jamais tarie et son aura non plus. Il a connu de grands moments, et nous avons sélectionné les plus mémorables pour vous replonger dans ce que certains ont appelé le Merckxisme. Un terme qui fut repris par le Directeur du Tour de France de la fin des années 60, donnant naissance à l’adverbe « merckxissimo », signifiant « avec panache et autorité ».
À l’occasion des 80 ans d’Eddy Merckx, VeloNews.be lance une série d’articles exclusifs pour retracer la carrière phénoménale du plus grand cycliste de tous les temps. Une célébration pour les nostalgiques et une découverte pour la jeune génération !
SALLANCHES 1964
Le jeune Bruxellois est déjà une terreur dans les catégories de jeunes. Grand favori de l’épreuve amateur des championnats du monde 1964, Eddy offre ce jour-là ce qui demeure, encore aujourd’hui, la dernière victoire belge dans cette catégorie. La course est limpide : il remporte seul son premier grand trophée en décrochant le titre de champion du monde amateur à Sallanches. Lors de la redoutable montée de la côte de Passy, il se détache de tous ses adversaires et offre un spectacle inoubliable. À l’arrivée, le légendaire reporter radio Léon Zitrone lance une proclamation qui résonne encore aujourd’hui : « Eddy Merckx, souvenez-vous bien de ce nom ! »
Sur le podium, il se hisse devant son compatriote Willy Planckaert et le Suédois Gösta Pettersson, scellant ainsi le début d’une légende.
MILAN-SAN REMO 1966
Il devient le plus jeune vainqueur de la « Classicissima ». La légende raconte que, en Belgique, sa mère émue aux larmes en regardant la télévision s’est effondrée d’émotion devant ce moment inoubliable. Eddy Merckx déclarera bien plus tard que c’est cette victoire qui lui a fait comprendre qu’il pourrait vivre de sa passion ! Ce monument deviendra son terrain de jeu, avec 6 autres succès sur un des monuments les plus durs à gagner.
CHAMPIONNAT DU MONDE 1967
L’Ogre de Tervuren commence la saison de manière remarquable. Il double la mise sur la Primavera, empoche sa première Flèche wallonne en solitaire et gagne deux étapes du Giro en terminant 9e au classement général. Mais la plus belle des victoires se dessine en fin d’année aux Pays-Bas, à Heerlen, lors des Championnats du monde.
Au sein de l’équipe nationale, Eddy n’est pas le leader unique et doit même composer avec des stars telles que Rik van Looy et Walter Godefroot. Pourtant, après 20 tours de circuit et 265 km, c’est bien le jeune homme de 22 ans qui lève les bras.
La course a ceci de particulier que son scénario s’avère, surtout aujourd’hui, spectaculaire. Dès le premier tour, sur la seule petite côte du parcours, une échappée se crée. Vigilant, Merckx saute dans les roues et, sans le savoir encore, accompagne le bon coup. Seuls deux coureurs reviennent à l’avant, notamment le régional Jan Janssen, qui accuse un retard de deux minutes sur le groupe de tête avant de se battre pour la victoire. Au final, le natif de Meensel-Kiezegem devance Jan Janssen d’un quart de roue et l’Espagnol Ramón Saez. Premier arc-en-ciel pour Eddy !
TOUR D’ITALIE 1968 / E12/ TRE CIME DI LAVAREDO
Même auréolé du maillot de champion du monde, le patron de l’équipe Peugeot de l’époque, Gaston Glaud, ne voulait pas miser sur Merckx pour l’avenir. Selon lui, cet avenir était incarné par Roger Pingeon, récent vainqueur du Tour.
Mal lui en a fallu, car en 1968, Merckx débute son règne sans partage. D’abord sur les classiques, il remporte son premier Paris–Roubaix devant Herman van Springel.
Comme un symbole, c’est le Roi qui gagne sur la Reine des Classiques, dans une édition marquée par l’introduction de la Trouée d’Arenberg sur le parcours. Mais cette victoire, si belle soit-elle, ne constitue pas le fait majeur d’Eddy.
Non, Merckx préfère l’Italie comme théâtre principal. Leader de la nouvelle formation Faema, il vient pour jouer la gagne, lui qui avait déjà prouvé qu’il pouvait s’imposer en montagne lors de la précédente édition au Blockhaus. Notre compatriote ressent dès le début de la course au Maglia Rosa un frisson d’excitation : il part chercher le gain de l’étape et le maillot rose d’emblée. Il cède ce maillot deux jours plus tard, suivant le conseil de son coéquipier Vittorio Adorni, pour préserver l’énergie de l’équipe. Mais ce n’est que partie remise.
Après avoir remporté la huitième étape à Brescia, il récupère le maillot rose lors de la douzième étape aux Tre Cime di Lavaredo. À l’issue d’une ascension finale dantesque, sur le signal d’Adorni, il s’élance en solitaire malgré le blizzard, le froid extrême et la neige, rattrape tous les échappés et Eddy surclasse ses adversaires : Gimondi perd plus de six minutes et les suivants sont à cinq. La presse encense cet exploit, soulignant son contrôle magistral de la fin de course.
Cette épopée montagnarde lui vaut son premier Giro d’Italia, en battant Adorni de cinq minutes et Gimondi de neuf minutes. Malgré les invitations, Merckx renonce au Tour de France après ce succès, pour mieux y revenir l’année d’après…